1 - ADVISO Partners opère sur tout le territoire.
D'autres cabinets de conseil en
fusions et acquisition, levées de fonds et
transmissions le font, mais il semble que
c'est une stratégie plus affirmée chez
vous...
Bertrand Thimonier : C'est vrai. Nous misons
beaucoup sur la proximité avec nos clients ainsi
que sur l'économie réelle. Et nous sommes
convaincus que la croissance commence d'abord
par les territoires, les marchés régionaux, et ne
se résume pas seulement à ce qui se passe à Paris.
La France bénéficie par ailleurs de bonnes
infrastructures, de formations homogènes et de
qualité, d'une organisation administrative
sérieuse et efficace. Autant d'atouts pour le développement
économique et l'installation des
acteurs en région. Toutefois, la mobilité reste
problématique lorsqu'on s'éloigne des métropoles.
Les villes moyennes, par exemple,
n'offrent pas - ou pas suffisamment - d'opportunités
professionnelles pour les conjoints. Mais
nous commençons à constater une tendance à
la relocalisation d'activités, notamment parce
que le transport devient un enjeu écoresponsable.
En ce qui me concerne, je crois beaucoup
à ce qu'on pourrait appeler des « circuits courts
de l'économie », où ce qui est produit localement
est d'abord consommé sur place, ce qui structure
le bassin de vie et d'emploi. Ce nouveau modèle
économique régional est appelé à être de plus
en plus valorisé par les consommateurs, à
l'heure de la globalisation.
2 - Que vous apprennent vos activités sur les territoires ? Et sur l'économie française en général ?
B.T. : Nous constatons là aussi une tendance
lourde : l'envie d'entreprendre est de plus en
plus présente en France. De plus en plus de
cadres souhaitent devenir entrepreneurs, et
ADVISO Partners est là pour les aider à structurer
et à financer leurs projets, notamment
sous forme de Management Buy Out s'ils
reprennent l'entreprise dans laquelle ils travaillent,
ou en Management Buy In, s'ils
viennent de l'extérieur. Nous voyons également
un intérêt pour les entreprises familiales, gages
de stabilité et de durabilité puisque la famille
détient le capital. Elles sont en outre synonymes
de lignes hiérarchiques plus courtes pour la
prise de décision et d'une stratégie connue de
tous. Mais cette envie d'entreprendre est telle
que nombre d'entreprises, PME et ETI, ont
désormais du mal à recruter des talents, tant
les étudiants des grandes écoles ou les professionnels
expérimentés que nous croisons
veulent être à la tête de leur propre structure !
3 - Les PME et ETI françaises sont les plus fortement créatrices d'emplois. Pensez-
vous que les autorités font assez pour les aider . Qu'en est-il des banques et des investisseurs ?
B.T. : On peut dire que depuis 2017, la dynamique
entrepreneuriale qui émerge est encore
plus valorisée par les pouvoirs publics. L'administration
y porte un regard bienveillant. De son
côté, Bpifrance dépense beaucoup d'énergie et
d'argent pour épauler les PME-ETI à travers
toute la France. Quant aux régions, elles font
elles aussi des efforts, en fonction de leurs
moyens. Pour leur part,
les banques soutiennent
largement les projets
d'entreprises
aujourd'hui, ne serait-ce
que parce que leurs
marges deviennent plus
faibles, du fait des taux
d'intérêt bas, et qu'elles
ont à coeur de valoriser
les opérations financières
à valeur ajoutée
des PME-ETI. Et il ne
faut pas oublier le privé !
Notre but, chez
ADVISO Partners est
d'aider les entreprises
dans la validation de leur plan de développement
stratégique en donnant naissance à un business
plan qui permettra de garantir la réussite et la
durabilité de ces sociétés. Grâce à ces ressources
financières et managériales, notre ambition est
de contribuer à ce que les PME françaises
deviennent des ETI, à l'image du fameux Mittelstand
allemand.
4 - ADVISO Partners a décidé de prendre régulièrement le pouls des Français à travers un baromètre des économies régionales. Pourquoi ?
B.T. : Nous étions confrontés à la faiblesse des
données disponibles dans ce domaine. Elles
existent au niveau national, mais pas franchement
dans les territoires. Nous avons donc pris
l'initiative de réaliser un tel baromètre, qui nous
apporte non seulement des données fiables et
actualisées, essentielles pour notre activité,
mais également de dresser un panorama général
des bassins économiques régionaux, loin des
préjugés et des idées reçues.
5 - Quels sont les principaux enseignements que vous tirez du baromètre ?
B.T. : Nous nous sommes rendu compte, à notre
grande satisfaction, que le moral était bien
orienté, avec une grande fluidité et une volonté
de prise de risque. Ce sont vraiment de bonnes
nouvelles car la dimension
psychologique, ce
qui va motiver les gens
à entreprendre, est l'un
des déterminants de la
croissance.
6 - Le baromètre
laisse entrevoir des
contradictions bien
française. D'une part, les Français sont optimistes sur
leur région (et sa
capacité à accueillir les entreprises), et de
l'autre, plus réservés
sur l'économie française dans son ensemble. De même, les personnes interrogées se disent peu confiantes dans l'avenir mais souhaitent quand même créer une
entreprise et prendre des risques... Comment interprétez-vous tout cela ?
B.T. : Il y a toujours ce paradoxe bien français,
qui fait qu'on se sent collectivement faible mais
individuellement fort... En France, hélas, l'union
ne fait pas la force. Nous vivons avec cette difficulté,
mais à terme, nous pourrions la dépasser.
D'autant qu'entre le renouvellement générationnel,
en particulier dans les entreprises familiales,
et la volonté de nombreux jeunes et moins jeunes de devenir entrepreneurs, il apparaît
clairement que la création ou la reprise d'entreprise
correspond à une réalisation de soi et à un
développement personnel, tandis que le travail
salarié d'entreprise, et particulièrement dans
les grands groupes, résonne de plus en plus
comme une contrainte, une vie professionnelle
faite de jeux de pouvoirs, où les projets concrets
ont parfois du mal à
prendre forme et où le
sens est souvent absent.
La vie dans les grands
groupes, surtout lorsqu'on
en est débarqué,
peut être très violente.
Or on s'en prémunit
lorsqu'on est actionnaire
ou propriétaire de
sa propre entreprise.
7 - Le fait qu'un
quart des personnes interrogées se disent
intéressées par la création d'une entreprise
semble être un vrai changement de mentalité. Comment l'encourager ?
B.T. : La tendance de fond est bien là. Pour
l'encourager, il faut mettre davantage en
lumière les dirigeants, les projets et les succès.
Il faut montrer aujourd'hui que l'on est heureux
dans les petites ou moyennes sociétés, que l'on
se réalise autrement parce que l'on donne du
sens à son projet, et que le statut - dans les
grandes structures, la voiture de fonction, le
grand bureau, le titre sur la carte de visite - n'a
plus autant d'importance. En ce qui me
concerne, j'ai fondé ADVISO Partners en 2015,
je prends beaucoup de plaisir à travailler au
quotidien avec mes associés et collaborateurs,
je vais au bureau à vélo et je n'ai jamais été aussi
heureux !
8 - Comment voyez-vous la France de demain au point de vue entrepreneurial ?
B.T. : Nous allons vers une France moins « intellectuelle
», moins dans le paraître, le statut, et
plus dans l'être, dans le sens et le plaisir à réaliser
des projets communs. À cet égard, ADVISO
Partners a lancé récemment un fonds de dotation,
« Autrement Adviso » privilégiant l'investissement
sociétal qui
ne peut pas être pris en
charge par le circuit économique
classique.
Mais pour nous, l'impact
social et environnemental
ne se réduit pas
à la RSE. Il va bien
au-delà. Il imprègne le
coeur du modèle de l'entreprise
qui doit s'interroger
sur l'e*et qu'elle
peut avoir sur la société,
tant du point de vue économique
que du point de vue social, sociétal et
environnemental. Le consommateur aussi, avec
l'acte d'achat, est davantage conscient qu'il a le
pouvoir de veiller à une meilleure répartition
de la valeur ou à la création d'une valeur plus
durable, plus écoresponsable. Chez ADVISO
Partners, nous mettons toute notre énergie,
toute notre intelligence, tout notre savoir-faire,
toute notre expérience, et bien sûr, tout notre
coeur, pour faire en sorte qu'une nouvelle
France, plus humaine et plus entrepreneuriale,
émerge.